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M. Christophe ROUILLON

Vice-président de l’Association des Maires de France chargé de l'Europe, membre du Comité des régions et des villes de l’Union Européenne

Ce sondage « refleting Europe ou donnez votre avis sur l’Europe » est le résultat d’un avis du comité des régions, que j’ai proposées il y a maintenant trois ans, et qui avait pour but de reconnecter l’Europe avec les citoyens. Nous partons du constat que les européens ne comprennent pas les modes de fonctionnement de l’Europe et qu’ils ont le sentiment de ne pas être entendus. Nous avons donc mis en place deux dispositifs. D’abord des dialogues citoyens qui ont lieu dans toute l’Europe, la France était pionnière à mon initiative, et ensuite pour que ces dialogues citoyens ne soient pas « des bouteilles à la mer » et n’aient pas de suite, nous avons mis en place ce questionnaire avec des questions ouvertes et des questions fermées. Celui-ci permet de faire une collection de l’ensemble des opinions des personnes qui ont donné une réponse et qui servira d’appui pour la rédaction d’un avis du comité des régions sur la question du futur de l’union.

 

Qu’est-ce qu’un dialogue citoyen, c’est une rencontre des citoyens avec leurs collectivités à un endroit donné ?

un dialogue citoyen c’est une rencontre organisée par les membres du comité des régions avec la participation de parlementaires européens, de locaux, de représentants de la société civile afin de débatre d’un sujet particulier. Par exemple, nous sommes allés parler d’immigration dans les alpes maritimes, nous avons parlé des appellations d’origine contrôlée dans le jura, nous avons parlé des problèmes de la pêche en Bretagne etc.
Nous sommes allés nous mettre un petit peu en danger pour écouter les citoyens là où ils ont des inquiétudes, des peurs et des colères. Ceci dans des formats très court, pas des rencontres académiques avec des gens qui font des longs discours mais au contraire des questions réponses, et une façon d’organiser le débat pour que chacun puisse donner son avis.

 

Vous avez un peu décodé ces retours pour construire vos questions et réponses possibles ?

Nous avons fait des comptes rendus de ces rencontres mais à un moment donné nous nous sommes dit qu’il fallait aller plus loin et qu’il fallait organiser un questionnaire au niveau européen. Diffusé sur internet, il a pour vocation de récolter des dizaines de milliers d’avis des européens dans toute l’Europe.

 

Est-ce que vous vous êtes fixés ou imposés des objectifs de volume ?

Nous espérons pouvoir aboutir d’ici la fin de l’année à 30 000, 40 000 réponses. Nous sommes déjà à 13 000, ce qui est déjà pas mal.

Nous allons également passer à la vitesse supérieure dans le cadre des consultations citoyennes. Elles vont être mises en place à l’initiative de la France et nous avons une volonté, en liaison avec la commission européenne, d’organiser 400 dialogues citoyens en 2018. Le but est d’aller dans toutes les régions et de pouvoir démultiplier ces rencontres citoyennes, qui vont s’appeler maintenant consultation démocratique, pour montrer aux européens, avant les élections européennes, que ceux qui sont les acteurs de l’Europe sont là pour les écouter, pour faire remonter leurs opinions vers les institutions européennes et pour répondre à la commande de Donald Tusk qui a souhaité avoir cet avis du comité des régions dans le cadre de la réflexion de la commission sur le futur de l’Europe.

 

En prévision des élections européennes de 2019, c’est un formidable outil aussi de mobilisation des citoyens européen ?

Nous voulons que les citoyens européens sachent à quoi sert l’Europe et toute l’importance de l’Europe et qu’ils passent de la critique systématique à la critique constructive. L’Europe est un atout formidable, elle fait beaucoup et si la croissance repart c’est grâce à elle. Cependant, il faut des critiques qui aillent dans un sens positif, la sortie de l’union Europe est une catastrophe on le voit avec le Brexit, donc aujourd’hui il faut oser dire ensemble comment est-ce qu’on peut améliorer l’union européenne.

 

Quels sont les enjeux et les risques d’une telle enquête car vous ne maitrisez pas les réponses vous ne pouvez que les analyser ?

Quand on pose une question on ne maîtrise pas toujours la réponse, c’est dans la nature des choses, mais le plus grand risque serait de ne pas poser de question et de ne pas écouter. Nous nous mettons donc un peu en danger car nous ne savons pas ce qui va sortir de ces questionnaires mais c’est une chance de savoir ce que les européens pensent et aussi d’être capable de recueillir leurs avis.
Chaque citoyen européen peut avoir une bonne idée pour améliorer l’Europe. Les élections européennes vont-être un moment vraiment crucial dans le futur de l’Europe, c’est pourquoi nous voulons contribuer à l’approfondissement de l’union européenne et à sa réussite. Chose essentielle pour chacune et chacun d’entre nous, à la fois pour le continent dans son ensemble mais également pour la vie quotidienne de chacun des européens dans les territoires de l’union européenne.

 

Le Comité européen des régions assumera pleinement les résultats obtenus ?

Nous assumerons, nous jouerons la transparence, nous donnerons en brut l’opinion des européens et je pense que ce sera un des éléments importants pour la restauration de la confiance des citoyens dans l’Europe et puis aussi pour l’objectif que j’avais au départ c’est-à-dire reconnecter l’Europe avec ses citoyens.

 


 
La réforme de l’Union économique et monétaire n’est pas seulement un enjeu franco-allemand mais une urgence systémique pour toute l’Europe

 

Par Christophe ROUILLON (PS), maire de Coulaines (Sarthe), membre du Comité européen des Régions, Vice-Président de l’Association des Maires de France chargé de l’Europe

Il reste peu de temps à « l’Europe » pour aboutir à des résultats concrets avant la campagne des élections européennes qui s’annoncent à haut risque.

La constitution en Italie, dans un des pays pilier de la zone euro, d’un gouvernement rassemblant les partis populistes et euro sceptiques de la Liga d’Alberto Salvini et du Mouvement 5 étoiles de Luigi Di Maio montre à quel point notre monnaie commune est menacée.

La réforme de l’Union économique et monétaire (UEM) n’est pas seulement un enjeu franco-allemand.

Elle doit restaurer la confiance des citoyens dans une monnaie au service de l’économie et de la prospérité pour tous, relancer l’investissement des 100.000 communes et régions d’Europe, et instaurer des mécanismes de gouvernance démocratique de l’eurozone.

Le prochain Conseil européen des 28 et 29 juin consacré à la réforme de l’UEM sera pour cela un moment de vérité.

Malgré des prévisions économiques d’apparence favorable présentées par la Commission européenne le 3 mai dernier, l’hétérogénéité économique entre les pays européens subsiste dans un climat mondial incertain.

La Commission prévoit qu’après une croissance moyenne de la zone euro de 2,4 % du PIB en 2017, son niveau le plus élevé depuis dix ans, l’expansion économique devrait se poursuivre en 2018 et probablement atteindre 2,0 % du PIB ; que plus aucun pays de l’Eurozone ne devrait avoir un déficit public supérieur à 3 % du PIB ; que le chômage, estimé à 7,6 % de la population active en 2017, est à son plus bas niveau depuis dix ans et devrait baisser à hauteur de 7,1 % en 2018 et de 6,7 % en 2019.

Pour autant, les bons chiffres macroéconomiques cachent une hétérogénéité toujours persistante entre les pays européens : la dette publique varie de 177,8 % du PIB en Grèce à 8,8% en Estonie, les taux de chômage en Grèce et en Espagne atteignent respectivement 20,1 % et 15,3 % tandis que l’Allemagne et les Pays-Bas sont en situation de plein emploi avec des taux respectifs de 3,6 % et de 3,8 %.

Le système bancaire italien n’est toujours pas assaini, les écarts de richesses entre le Nord et le Sud se creusent, la BCE est dans l’impossibilité d’atteindre, malgré le volontarisme salutaire de « Super Mario », sa cible vertueuse de 2% d’inflation.

Au niveau mondial, les fragilités du système financier subsistent, notamment en Chine et aux États-Unis. Le retour du protectionnisme, de l’unilatéralisme et la croissance vertigineuse d’une dette publique et privée atteignant pour la première fois 164 000 milliards de dollars – soit 225 % du produit intérieur brut mondial – menacent sérieusement les perspectives de croissance à moyen terme.

En réalité, le retour de la croissance en Europe prend appui sur une économie mondiale dopée à la création monétaire et sur une financiarisation accrue, plutôt que sur une politique européenne coordonnée et axée sur la relance de l’économie réelle.

Les statistiques d’Eurostat mettent aussi à jour le sous- ou même le désinvestissement public à l’échelle européenne – qui a diminué de 0,7% entre en 2008 et 2016.

La situation de la zone euro reste déflagratoire. Pourtant, en arrière-fond du match Macron-Merkel, la torpeur semble l‘emporter et aucune dynamique de réforme ne se profile à l’horizon.

L’Euro a survécu difficilement à un premier infarctus après la crise de 2008. Pour prévenir un second bien plus grave, il faut au plus vite mettre en commun des moyens financiers suffisants pour prévenir un nouveau choc économique systémique. Sinon les contribuables devront débourser dix fois plus pour payer l’addition d’une intervention massive de dernière minute.

Les propositions mises sur la table par la Commission européenne le 2 mai dernier dans le contexte du prochain budget à long terme de l’Union européenne sont bien trop frileuses au regard des enjeux vitaux pour l’Europe.

La Commission s’en tient à proposer un soutien sous forme de prêts garantis par le budget européen à hauteur de seulement 30 milliards d’euros. En comparaison avec les 1000 milliards de dollars que les Etats-Unis avaient su mobiliser en 2008 au début de la crise, un tel montant produirait au mieux un effet placebo.

La Commission propose par ailleurs un instrument de soutien aux « réformes structurelles » doté d’une enveloppe de 25 milliards d’euros. Or, à budget total de l’Union européenne plus ou moins constant, cet instrument rogne d’autant les marges de la politique de cohésion territoriale visant à encourager, dans la durée, les transitions écologiques, industrielles et sociales portées par les collectivités territoriales. Qui plus est, cet instrument porterait sur des « réformes structurelles », c’est-à-dire un « concept valise », dont le périmètre, la valeur ajoutée européenne et l’impact économique recherché ne sont pas définis.

Au Comité européen des Régions, nous plaidons pour la mise en place d’un véritable Fonds de secours, appelé par la Commission Fonds monétaire européen, à hauteur de 100 milliards d’euros capable de surmonter les chocs économiques asymétriques qui frapperaient certains États membres.

Ce fonds de secours doit s’accompagner d’une politique de cohésion accessible à l’ensemble des collectivités territoriales européennes et dotée, après 2020, de moyens au moins équivalents à ceux prévus dans l’actuelle période de programmation. Les communes et les régions d’Europe demandent aussi que les investissements européens au niveau des collectivités territoriales ne soient plus intégrés dans le calcul des déficits étatiques.

Évitons qu’une approche trop comptable du débat sur le futur de l’Union économique et monétaire occulte le degré d’urgence à mettre en place une vraie résistance de la monnaie européenne et à créer les conditions d’une croissance durable et long terme.

 

 

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