Campus France, qui est chargée de la promotion de l’enseignement supérieur français à l’international et la mobilité des étudiants étrangers, aide à construire les réseaux d’influence de demain.
Quelles sont les principales missions de Campus France ?
Campus France est, avec l’Institut français et France expertise internationale, l’un des trois organismes créés en 2010 par la loi de l’action extérieure. Nous sommes chargés de la promotion de l’enseignement supérieur de l’accueil et de la mobilité internationale. Campus France est sous l’autorité d’une double tutelle : le ministère des Affaires étrangères et du Développement international et le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche. La présidente de notre conseil d’administration, Sophie Béjean, est également la présidente du CNOUS (Centre national des œuvres universitaires et scolaires).
Campus France a trois missions. La première est la mise en valeur de l’offre d’enseignement supérieur français grâce à une importante production éditoriale et un site Internet (campusfrance.org) qui reçoit plus de 16 millions de visiteurs chaque année. Nous organisons également, de Paris, une cinquantaine de promotions, et nos correspondants dans les ambassades près de 3 000. Notre deuxième mission est de gérer des programmes de mobilité. Nous sommes devenus, depuis 2012, l’opérateur unique du système de bourses du gouvernement français, mais nous gérons aussi des programmes de mobilité financés par des fonds non publics, comme des fonds d’universités, de gouvernements étrangers ou des entreprises. Nous sommes, par exemple, partenaires du Gabon, ou du Brésil dans le cadre du programme Sciences sans frontières qui envoie de très nombreux boursiers dans le monde. Nos tâches sont très variées. Pour certains programmes, nous fonctionnons comme une agence de paiement, pour d’autres, nous faisons de l’ingénierie pédagogique. Nous avons ainsi conçu pour le Pérou, à la demande de ses plus hautes autorités, un programme dédié aux élèves de zones défavorisées pour leur permettre de suivre un cursus en France.
Notre réseau à l’étranger est constitué des espaces Campus France présents dans les ambassades. Cela représente quelque 300 personnes réparties dans 200 bureaux dans 115 pays qui accueillent les étudiants et leur donnent accès à toutes les informations et conseils dont ils ont besoin. Nous leur transmettons du matériel pédagogique, et ils disposent de financements spécifiques. C’est notre premier réseau. Le second, ce sont les établissements d’enseignement supérieur et de recherche à travers le forum Campus France. Celui-ci réunit tous les établissements dont nous validons la qualité pédagogique après avis de représentants des conférences des établissements d’enseignement supérieur du ministère de l’Enseignement. Les étudiants, qui choisissent un établissement membre du forum Campus France, ont la garantie d’une formation reconnue par l’État, d’un diplôme et d’une soutenabilité économique. Nous sommes, certes, une agence importante, 240 personnes, mais qui s’appuie sur un vaste réseau à l’étranger et un très bon réseau en France. Nous sommes tout à la fois ancrés dans la diplomatie et dans l’enseignement supérieur.
La promotion à l’étranger du système d’enseignement supérieur et de formation professionnelle peut-elle avoir des conséquences sur le rayonnement culturel de la France ?
Lorsque des élites économiques, politiques, scientifiques se forment grâce à un enseignement supérieur français, cela crée une proximité intellectuelle naturelle. C’est un levier d’influence. Il ne faut pas non plus négliger l’originalité de l’enseignement supérieur français. Comme j’ai pu le constater au cours de rencontres, tous nos interlocuteurs ayant suivi un enseignement en France ont apprécié l’interactivité de l’enseignement français qui leur offre un potentiel très important. Cependant, pour renforcer cette influence, encore faut-il garder la trace de tous ceux qui sont passés et Laurent Fabius nous a confié cette mission. Pour cela, le ministre a lancé le 26 novembre dernier francealumni.fr, le nouveau réseau social français destiné aux anciens étudiants étrangers ayant fait des études en France. En ce début d’année, plus de 4 500 anciens étudiants se sont inscrits sur ce site. Les anciens étudiants participent volontiers à des actions de coopération bilatérales, afin de prolonger une expérience française dont ils gardent un très bon souvenir.
Comment peut-on rendre nos uni- versités plus compétitives face à la concurrence des établissements suisses ou des pays nordiques par exemple ?
La Suisse, le Québec et la Belgique sont des pays franco-phones dont la qualité de l’enseignement attire également les viviers francophones mondiaux. Il nous revient de proposer une offre de qualité et de la faire connaître. Les gouvernements s’accordent à reconnaître l’importance de l’investissement dans la recherche et l’enseignement supérieur. Les différents plans, l’appel à des fonds compétitifs de financement, de l’Agence nationale de recherche, mais aussi à des fonds européens font que les laboratoires et les universités sont motivés pour proposer des dossiers de toujours plus grande qualité. Nos distinctions scientifiques : prix Nobels, médailles Fields montrent que nous sommes toujours à la pointe de la recherche. Grâce aux regroupements des universités en 25 grands pôles, notre offre est plus lisible et plus visible à l’étranger. Il nous faut encore travailler sur la facilitation de l’accueil et notamment des procédures administratives encore compliquées pour les étudiants. En fédérant toutes les structures de l’accueil autour d’un guichet unique, ces formalités seront moins pénibles et ce sera un facteur d’attractivité.
Quel est le rôle des pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) ?
Les PRES vont désormais s’appeler Communautés d’universités et d’établissements (COMUE).
Campus France est habilité à aider les établissements de recherche, à partir des analyses que nous avons sur les pays, à établir une stratégie internationale et à trouver des financements pour accueillir des boursiers. En partenariat avec deux régions et leur COMUE Rhône-Alpes (Grenoble et Lyon), et Midi-Pyrénées (Toulouse), nous avons remporté un dossier de financement européen pour développer des postes de chercheurs. Notre aide a consisté à mutualiser les moyens, à organiser des sélections avec des jurys internationaux, ce qui garantit ainsi un recrutement de qualité.
Campus France s’est dotée d’un nouveau volet économique. En quoi consiste sa mission dans ce cadre ?
Notre rôle auprès des entreprises est de mieux articuler leurs préoccupations avec celles des établissements. Lorsqu’un étudiant vient faire ses études en France, il espère que ça va améliorer son employabilité. Mais cette employabilité, c’est l’entreprise qui en juge. Chacun sait qu’une expérience de stage est très importante pour l’employabilité et les étudiants recherchent celle-ci à l’issue de leurs études. Pour répondre à ce désir, nous avons commencé à constituer un troisième réseau de partenaires chez les entreprises capables de nous accompagner afin de proposer des offres de stage aux étudiants étrangers. Les entreprises sont également partenaires du réseau Alumni. Cela peut leur faciliter l’embauche d’ingénieurs, de commerciaux du pays qui comprennent la culture française. Cette collaboration fructueuse n’en est qu’à ses débuts.
De plus, certaines de nos entreprises, leaders mondiaux dans la haute technologie, attirent beaucoup les étudiants. Articuler, tout mettre en réseau, voilà l’objectif de Campus France. Notre mission, c’est de mettre en relation des acteurs qui ont parfois du mal à trouver une plate-forme commune. Nous jouons ce rôle au service de la diplomatie d’influence dans la communauté d’étudiants et de chercheurs.