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Interview croisée de Belaide Bedreddine et de Jacques Olivier

Président et Directeur Général du SIAAP

Pouvez-vous nous présenter le SIAAP ? quelles sont vos missions et compétences ?

Jacques Olivier : Créé en 1970 par quatre départements franciliens pour assurer le transport et la dépollution de leurs eaux usées, le SIAAP (Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération Parisienne) est le Service public qui dépollue chaque jour les eaux usées de près de 9 millions de Franciliens, ainsi que les eaux pluviales et industrielles, pour rendre à la Seine et à la Marne une eau propice au développement du milieu naturel.
Grâce à ses 1928 agents, le SIAAP dépollue 7J/7 et 24H/24, près de 2,5 millions de m³ d’eau qu’il transporte par 440 km d’émissaires et traite au sein de ses 6 usines d’épuration. Service Public de l’Assainissement, notre mission fait prévaloir l’intérêt général au service des usagers et des territoires avec l’objectif de la performance, et de l’égalité de traitement pour tous.

Le SIAAP est depuis longtemps très investis et engagé dans le développement durable, pouvez-vous revenir sur votre vision de l’eau urbaine durable et sur les villes « EAU- Responsable » ?

Belaide Bedreddine : L’objectif des principes de l’International Water Association (IWA) pour les Villes « Eau-responsables » est d’encourager des actions collaboratives tout en prenant en compte 3 paradigmes : les ressources naturelles sont limitées et nous devons faire plus avec moins, la croissance urbaine est à la fois une opportunité pour le développement économique et une menace pour la qualité de vie, la planification urbaine doit prendre en compte différents facteurs d’incertitude tels que le changement climatique ou la croissance démographique.

Dans ce contexte, le SIAAP, en tant que partenaire historique de l’IWA, accompagne les nombreux élus franciliens et collectivités qui ont à leur tour adhéré en avril 2018 à ces principes dans la mise en œuvre de politiques publiques qui permettront de construire la ville de demain, résiliente et durable, et une gestion plus responsable de l’eau en milieu urbain. L’enjeu est de taille pour les défis posés aux grandes mégapoles, notre intervention à l’international vise aussi à promouvoir des alliances nouvelles pour répondre aux défis climatiques.

Une synergie est en place dans le cadre des grands services urbains de la Métropole du Grand Paris, quelles sont les innovations en place et à venir ?

B.B : Nous avons fait le choix d’initier une coopération avec les services publics urbains franciliens afin d’optimiser concrètement notre impact en Ile-de-France. Notre ambition était de créer une boucle de services urbains, complémentaires et innovants, capables d’agir de façon coordonnée au service des franciliens. Notre coopération avec les grands syndicats de services publics urbains, le Syctom, le SEDIF, le SIPPEREC, le SIGEIF et l’EPTB Seine Grands Lacs a été dès la COP21, une opportunité de défendre notre place et notre rôle dans la lutte contre le réchauffement climatique.

J.O : Aujourd’hui, notre volonté est d’accélérer encore la mise en place de synergies à l’échelle de la Métropole. Pour cela, nous avons en effet signé le 29 mars dernier un protocole stratégique de avec la Métropole du Grand Paris, réunissant l’ensemble des services publics urbains d’Ile-de-France. La signature de ce protocole a vocation à entretenir une dynamique partenariale, qui se décline d’ores et déjà par des travaux transversaux sur des projets d’intérêt général comme la maîtrise de l’énergie, l’amélioration de la qualité de l’air, la promotion de l’économie circulaire, la ville intelligente, la place des grands équipements métropolitains, la logistique urbaine ou encore l’adaptation au changement climatique.

Ce sont donc sur tous ces sujets que le SIAAP, avec les autres grands syndicats urbains d’Ile-de-France, nous travaillons en concertation pour apporter à la métropole une contribution sur les clés d’équilibre environnemental et énergétique raisonné, et nécessaire pour l’avenir de la Métropole francilienne.

L’usager au centre du service public est votre raison d’être, comment le projet SIAAP 2030 répond à cet objectif ?

J.O : Notre plan stratégique SIAAP 2030 – « Ensemble construisons l’avenir », a l’ambition de donner au SIAAP les moyens d’être toujours plus performant, de mieux remplir son rôle d’exploitant, d’améliorer la maintenance de ses équipements industriels et d’harmoniser l’ensemble de ses processus industriels afin de gagner en efficience et de renforcer la transversalité de ces missions.

Il vise surtout à répondre aux attentes des usagers franciliens : qualité du Service Public, préservation du cadre de vie, protection de l’environnement, accélération de la transition énergétique. C’est en améliorant en permanence l’efficacité de nos process que nous sommes en mesure de proposer aux usagers un service toujours plus efficient, au meilleur coût.

B.B : En 2018, pour la première fois depuis 14 ans, l’augmentation de la redevance d’assainissement votée à l’unanimité par le Conseil d’administration a pu ainsi être contenue à une hausse de 2 %. Ce qui est une bonne nouvelle pour l’usager dans un contexte où le poids de la facture d’eau pèse dans le budget des ménages et où les coûts de traitements s’alourdissent pour être répondre aux directives sur l’eau et l’assainissement en matière épuratoire.
Le plan stratégique SIAAP 2030 a, en grande partie, permis de relever ce défi grâce au développement d’un outil de prospective pluriannuelle.

C’est la force du service public d’être en capacité de concilier une stratégie ambitieuse de long-terme et des réponses concrètes et rapides aux attentes quotidiennes de nos 9 millions d’usagers.

Quel est votre avis sur les enjeux européens et ceux de la gouvernance territoriale?

B.B : Les territoires ont un rôle majeur à jouer dans la lutte contre le dérèglement climatique. La coopération efficace entre les différents acteurs de l’eau et de l’énergie, à l’échelle locale, nationale et européenne, est indispensable pour faire face au défi de la gestion intégrée du cycle de l’eau et à la transition énergétique, dans un environnement réglementaire en constante évolution.

En s’engageant localement, avec les départements, les territoires, les collectivités territoriales en matière d’innovation énergétique, de valorisation des boues d’épuration, d’économie circulaire, le SIAAP entend réaffirmer concrètement le rôle essentiel de tous ces acteurs du territoire dans la lutte contre le réchauffement climatique. Le champ de synergies nouvelles est devant nous. Personne n’a la réponse seul.

A l’échelle européenne, les villes et les territoires sont perçus comme des leviers essentiels pour mettre en œuvre une politique urbaine et environnementale cohérente. C’est pourquoi il est primordial que les territoires et les grandes villes européennes entretiennent un dialogue constant et soutenu, en complément des échanges à l’échelle des Etats, afin de promouvoir des solutions locales, conçues pour répondre aux besoins de leurs habitants.

J.O : C’est tout le sens de notre partenariat stratégique avec l’entreprise publique de traitement de l’eau berlinoise, la Berliner Wasserbetriebe (BWB) qui fait face à des enjeux similaires aux nôtres, et avec qui nous allons systématiser le partage de connaissance et de techniques sur le long-terme. La démarche engagée avec SIAAP 2030 d’initier des parangonnages avec de grandes métropoles donnent corps à la nécessité de renforcer à l’échelle européenne comme mondiale des coopérations techniques et efficaces pour faire face aux défis environnementaux.

Quelques mots sur l’engagement du SIAAP à l’international ?

B.B : C’est la fierté du SIAAP d’accompagner partout dans le monde, à leur demande, des autorités locales qui ont besoin, notamment dans des pays qui connaissent des difficultés, de bénéficier de notre expérience et de notre expertise pour construire un système d’assainissement adapté aux besoins de leur population. La coopération décentralisée est aujourd’hui devenue un élément majeur de l’action internationale du SIAAP que nous avons le devoir, en tant que grand service public de l’eau, de continuer à développer quand 2 milliards d’habitants n’ont pas encore accès à un service d’assainissement.

Le rayonnement de nos actions internationales sont le fruit d’une volonté politique portée par le Conseil d’Administration. C’est un devoir et un levier pour promouvoir le droit à l’assainissement dans le monde mais aussi de participer à répondre à d’autres défis ; l’urbanisation de la planète, le réchauffement climatique. A travers nos actions, nous entendons aussi construire une démarche collective des acteurs institutionnels nationaux et internationaux pour s’inscrire plus efficacement dans les objectifs fixés par l’ONU en matière environnementale.

J.O : A l’échelle institutionnelle, nous nous sommes largement mobilisés pour faire porter la voix du SIAAP lors de grands évènements structurants comme la COP23 à Bonn, l’IWA ou le FME 2018 qui se tenait autour du thème « Sharing Water » et durant lequel le SIAAP a co-piloté le thème « Urban ».

C’était une formidable chance pour le SIAAP d’avoir été choisi parmi un grand nombre d’acteurs internationaux de l’eau et de l’assainissement pour porter une vision renouvelée de la ville de demain et faire partager nos savoirs faires, nos métiers, nos innovations et apprendre aussi d’autres partenaires.

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