L’Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne (AFTRP) pilotera prochainement, sous la nouvelle dénomination de « Grand Paris Aménagement », le plan de mobilisation pour l’aménagement et le logement, annoncé à l’automne dernier par le Premier ministre. Un dispositif destiné à tenir l’objectif de construction des 70000 logements chaque année.
Pouvez-vous nous rappeler les métiers de l’AFTRP ?
L’AFTRP, qui deviendra bientôt « Grand Paris Aménagement », a été créée en 1962 par Paul Delouvrier, d’abord comme pour incubateur, puis pour réaliser le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la région de Paris. L’agence a été conçue pour créer les villes nouvelles sur un foncier qu’il fallait maîtriser, et aménager les logements et les activités autour du futur RER.
Au fil des années, l’agence a évolué au rythme de ses missions ayant elle-même évolué avec les lois de décentralisation au début des années quatre-vingt qui ont transféré les compétences d’aménagement aux collectivités, puis avec l’application du droit de la concurrence communautaire aux opérations d’aménagement, à partir de 2005.
De sorte que, aujourd’hui, on peut considérer que l’agence exerce trois métiers. D’abord, celui d’opérateur foncier, au sens classique du terme. Puis, ce que j’appelle celui d’ « acteur de la subsidiarité » ; en d’autres termes, un opérateur qui agit là où le marché, l’État ou les collectivités ne peuvent pas le faire. Cela peut être le cas pour les PRU les plus difficiles, pour le portage et la gestion des copropriétés dégradées, ou encore pour les plans de lutte contre l’habitat indigne.
C’est le cas, par exemple, à Clichy-sous-Bois, dans le cadre de l’opération de requalification des copropriétés dégradées dans l’intérêt national (OIN ORCOD), désormais auprès de l’Etablissement public Foncier d’Île-de-France (EPFIF).
Enfin, notre troisième métier est celui d’aménageur urbain. Nous avons la particularité d’intervenir sur un territoire couvrant l’ensemble de la Région Île-de-France, et qui n’a pas vocation à se réduire à la métropole institutionnelle du Grand Paris.
Nous avons également la particularité de regrouper une chaîne intégrée des métiers : foncier, habitat, aménagement. Nous intervenons soit avec mandat de l’État, comme pour une Opération d’Intérêt national (OIN) ; soit dans la sphère concurrentielle, au terme de procédures de mise en concurrence organisées par les collectivités locales pour devenir titulaire de concessions d’aménagement ; soit encore comme un aménageur privé, c’est-à-dire sur initiative propre ou en compte propre.
Vous devez donc rechercher la performance ?
Nous menons actuellement une cinquantaine d’opérations d’aménagement en Île-de-France, produisons du logement et des bâtiments d’activité économique et tertiaires. Nous sommes une entreprise publique performante, évoluant sur le marché concurrentiel, dans un souci de positivité de notre résultat, sans subvention de fonctionnement. Bref, une entreprise publique moderne.
Dans cette logique, comment appréciez-vous la place logement dans la construction du Grand Paris ?
Il y a quelques années, au moment de l’élaboration du nouveau réseau de transports Grand Paris Express, des études avaient montré que ce grand projet d’ infrastructure pourrait générer jusqu’à 200 000 logements neufs autour des 200 kilomètres de son tracé et de ses 72 gares. Le Grand Paris incarnait une grande promesse, avec à la clé des solutions pour accroître la mobilité des habitants, la création de logements dont l’ Île-de-France manque cruellement, en rapprochant lieux de vie et de travail, et une plus grande attractivité économique du territoire.
Petit à petit, cette dimension était passée au second plan, au profit de la construction institutionnelle de la future métropole du Grand Paris et de celle du métro lui-même, aussi complexes l’une et l’autre. C’était sans doute inévitable. Les derniers chiffres de la construction nous rappellent à la réalité : nous construisons davantage qu’hier en Île-de-France mais encore trop peu pour enrayer la crise du logement.
Les raisons en sont multiples, et sans cesse rappelées : un mécanisme grippé de l’offre foncière ; le poids des normes et des procédures ; et les difficultés plus rarement les réticences des élus à produire de nouveaux logements (d’accession libre, abordables ou sociaux) dans leurs communes. Les conséquences sont connues de tous : les franciliens ont de plus en plus de mal à se loger, la part du budget qu’ils consacrent au logement ne cesse de croître. 560 000 ménages vivent ainsi dans une habitation sur-occupée, 8 % des ménages franciliens étant mal-logés. De nombreuses études ont montré que le déficit de logement pesait sur l’attractivité économique de notre région, les entreprises ayant même parfois des difficultés à recruter.
Le SDRIF a fixé un objectif de construction de 70 000 logements par an pour répondre aux besoins actuels de logements des ménages, anticiper les demandes futures, et rattraper le déficit accumulé ces vingt dernières années. Aujourd’hui consensuel, ce chiffre tient compte de l’évolution démographique des flux et des emplois en Île-de-France, mais également des besoins pour préserver et accroître l’attractivité des territoires.
Pour contribuer à l’atteinte de cet objectif, le premier ministre a annoncé le 13 octobre dernier un plan de mobilisation pour l’aménagement et le logement en Île-de-France. Logement et aménagement redeviennent une priorité pour le Grand Paris et nous ne pouvons que nous en réjouir au regard de l’urgence qu’il y a à agir.
En quoi consiste ce plan de mobi- lisation pour l’aménagement et le logement ?
Ce Plan comprend une Opération d’intérêt national multi-sites d’une nouvelle génération, adossée notamment aux réseaux de transports et qui sera pilotée par l’ AFTRP, transformée en Grand Paris Aménagement, avec pour ambition d’augmenter, d’ accélérer, de faciliter et de débloquer la production en Île-de-France. Ce dispositif vise à aider collectivités et élus à réaliser les opérations d’ aménagement qui sortent difficilement aujourd’hui. Rien ne se fera sans leur concours, ni celui des outils d’aménagement des territoires comme les SEM.
Dans un premier temps, une concertation, sous la forme d’ateliers, sera menée sur les territoires pour identifier les potentiels de construction de logement, les projets et les besoins. Les premiers ateliers commenceront en avril.
À l’issue de cette concertation, le plan de mobilisation sera déployé là où cela s’avère le plus pertinent. L’intervention de l’État sera adaptée à la nature des sites et des besoins des territoires : certains sites bénéficieront du dispositif d’Opération d’intérêt national multi-sites ; d’autres bénéficieront du soutien de l’État sans procédure d’OIN, pour accompagner et conforter les projets de développement ou valoriser des démonstrateurs.