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M. George Gabriel Bologan

Ambassadeur de Roumanie en Italie

Après un parcours académique et journalistique en Italie, vous embrassez la carrière diplomatique pour prendre la responsabilité de promouvoir votre pays en Italie en accédant à la fonction d’Ambassadeur de la Roumanie en Italie, comment appréhendez-vous cette mission ? Comment votre parcours vous a servis ? Quel bilan pouvez-vous tirer après deux années ?

Mon histoire en Italie commence en 1996 quand je suis arrivé à Rome avec une bourse d’études du Collège Pontifical « Pio Romeno”. Plus tard, j’ai eu une expérience en tant que journaliste accrédité auprès du Saint-Siège, spécialisé dans la communication sociale, qui m’a offert de nombreuses raisons de satisfaction professionnelle. J’ai commencé ma carrière diplomatique en 2003 à l’ambassade de Roumanie à Rome, puis j’ai continué avec quatre ans en tant que consul général à Milan. Cette carrière professionnelle me justifie de me considérer un roumain « de la communauté », ce qui me permet de comprendre et même de sentir ce que signifie être roumain en Italie. Bien sûr, c’est un grand honneur pour moi de représenter mon pays en Italie comme ambassadeur et, en tant que tel, j’essaie de contribuer au développement du partenariat stratégique entre la Roumanie et l’Italia et au renforcement des liens entre notre pays et la grande communauté de roumains qui vivent, travaillent ou étudient ici. Deux ans après avoir assumé le mandat comme ambassadeur à Rome, je peux dire que, selon les signaux des partenaires italiens et des roumains en Italie, nous sommes sur la bonne voie.

 

Les relations culturelles et politiques entre la Roumanie et l’Italie remontent au 18ième siècles. Quel est aujourd’hui le climat des relations politiques et culturelles ?

Votre question me donne l’occasion de mettre en lumière la très riche histoire des relations politiques, économiques et culturelles entre la Roumanie et l’Italie. N’oublions pas que cette année nous célébrons 145 ans depuis l’ouverture de la première agence diplomatique roumaine à Rome en 1873 et 10 ans de partenariat stratégique consolidé. Partant de liens historiques, culturels et linguistiques très forts, les relations politiques entre la Roumanie et l’Italie ont connu de nombreux changements, les développements les plus importants ayant eu lieu depuis les années 1990.

Pendant les deux dernières décennies, les relations bilatérales se sont intensifiées avec l’adhésion de notre pays à l’OTAN et à l’UE. Politiquement, nos pays sont devenus des partenaires et des alliés proches, maintenant un dialogue constant et substantiel au niveau bilatéral, européen et international, qui a contribué à approfondir nos relations bilatérales très spéciales.

Ce n’est pas une banalité si nous affirmons que nos pays sont liés par une relation privilégiée: la Roumanie est en effet le seul pays qui porte Rome en son nom, un témoignage constant de notre histoire commune, qui commence il y a environ deux millénaires et qui, pour notre pays, a été même un point de repère pour la réalisation de la Grande Union, dont nous célébrons le centenaire cette année. Le cadre des relations politiques et culturelles est donc très propice à une collaboration substantielle sur sujets d’intérêt commun, l’un des éléments centraux étant l’intérêt des nos pays pour le rapprochement de l’UE aux citoyens, afin que la collaboration européenne réponde aux réels besoins des citoyens et contribue à la croissance de la solidarité entre les partenaires européens.

Au même temps, les relations économiques entre nos pays consacrent l’Italie en tant que partenaire stratégique pour la Roumanie, avec un volume record des échanges commerciaux en 2017.

De même, nos communautés, des roumains en Italie et des italiens en Roumanie, constituent un pont très important, qui contribue également à approfondir le partenariat stratégique consolidé entre les deux pays.

 

Vous préconisez une Diplomatie Culturelle, pouvez-vous expliquer votre approche ?

Nous avons besoin de la diplomatie publique et culturelle pour relier nos actions de politique étrangère aux citoyens, pour accroître le niveau de participation dans nos sociétés et pour relever de la manière la plus intégrée possible les défis auxquels nous sommes confrontés. Grâce à la culture, nous comprenons mieux l’autre et nous améliorons notre capacité à nous adapter et à surmonter les obstacles. C’est pourquoi je crois que la diplomatie publique et culturelle peut constituer la base de toutes les autres actions diplomatiques.

Je crois fermement que la diplomatie culturelle nous aide à combattre les préjugés qui ont souvent donné lieu à des malentendus et à développer une culture de la confiance, la base d’une véritable politique de cohésion. La culture contribue au bien-être général et au développement de nos sociétés, en ayant une importante composante humaine, sociale mais aussi économique. En recourant systématiquement à des actions de diplomatie culturelle, nous faisons connues les valeurs roumaines et, en même temps, nous transmettons un message d’ouverture qui contribue à la connaissance mutuelle et à l’amélioration du dialogue interculturel.

 

Dès l’entrée de la Roumanie dans l’Union européennes en 2007, les relations commerciales entre la Roumanie et l’Italie se sont développées, où en sommes-nous aujourd’hui ?

Les relations économiques et commerciales entre la Roumanie et l’Italie peuvent être considérées excellentes, considérant que l’Italie est le 2ème partenaire commercial de la Roumanie, avec 10,8% du commerce extérieur total roumain. À la fin de 2017, la valeur totale des échanges commerciaux bilatérales a dépassé 14,61 milliards d’euros, en hausse de 7,62% par rapport à 2016, la valeur la plus élevée des dix dernières années. En plus, cette tendance de croissance a été confirmée plus tôt cette année, selon les dernières données du Ministère des Affaires, du Commerce et de l’Entrepreneuriat en Roumanie. La balance commerciale est équilibrée, avec une valeur totale des exportations roumaines de 7,03 milliards d’euros et des importations de produits italiens en Roumanie de 7,58 milliards d’euros en 2017.

Les entreprises italiennes sont très intéressées par le marché roumain, dans lequel elles ont investi 2,36 milliards d’euros l’année précédente (l’Italie étant, de ce point de vue, le 6ème investisseur étranger en Roumanie) et où elles ont mis en place un nombre important de sociétés de capitaux italiens. En effet, avec 23 446 entreprises roumaines actives, l’Italie occupe la première place dans le top des investisseurs étrangers, de ce point de vue.

 

Quel est le rôle de l’Ambassade de Roumanie en Italie dans l’accroissement des relations économiques et culturelles ?

L’action diplomatique dans les sphères économiques et culturelles implique la construction des ponts pour identifier, promouvoir et défendre les intérêts communs, et cela se produit à la fois en favorisant un programme dynamique et riche de contacts entre les directions de nos états et en stimulant la collaboration économique et culturelle à tous les niveaux, y compris par des contacts interhumains. J’insiste donc sur l’importance des actions de diplomatie publique pour réitérer leur contribution à l’amélioration et au renforcement des relations économiques et culturelles par le fait que chaque initiative de ce type est un vecteur de message.

 

Quelles sont les grands projets et objectifs visés par votre Ambassade dans les années à venir ?

Bien sûr, la priorité de l’Ambassade de Roumanie à Rome est l’implémentation des lignes de politique étrangère établiées par le Ministère des Affaires Etrangères, en tenant compte de la spécificité de la relation de partenariat spécial entre nos pays. De ce point de vue, nos objectifs sont de renforcer la relation bilatérale, de continuer à soutenir la communauté roumaine en Italie – la plus grande communauté étrangère en Italie et la plus grande communauté de roumains à l’étranger. Nous continuerons également à promouvoir la culture roumaine en Italie, en collaboration avec les institutions roumaines de la péninsule, en tenant toujours compte du rôle de la culture, des lier personnes et sociétés. Nous aurons, bien sûr, un calendrier chargé dans la première moitié du 2019, pendant la présidence roumaine du Conseil de l’UE ; et dans ce cas, notre priorité sera de promouvoir le principe de cohésion en tant que valeur commune de l’UE et de placer le citoyen au premier plan afin de stimuler l’implication active des citoyens et de rétablir leur confiance dans le projet européen, par le retour aux fondements de la construction européenne et un processus décisionnel plus transparent.

 

Enfin, à la veille d’élection européennes majeures, quel message souhaitez-vous adresser à l’Italie, aux italiens et aux roumains en Italie ?

L’Italie est un état fondateur de l’UE et la tradition de l’européanisme de ses hommes d’État et penseurs est une source d’inspiration et une partie du patrimoine commun. Il suffit de mentionner Alcide De Gasperi et Altiero Spinelli. De Gasperi a déclaré que les politiciens ne s’intéressent qu’au présent et que les gens pensent toujours à ce qu’ils laisseront aux générations futures. L’Europe a besoin d’un leadership clairvoyant, qui donne aux générations futures le cadre nécessaire pour une société sûre et prospère, sûre d’elle-même et qui inspire optimisme et enthousiasme pour les valeurs qui ont fait l’Europe grandir et offrir une chance à beaucoup de gens.

Dommage que la mémoire des gens soit courte et que l’histoire ne soit pas suffisamment étudiée. L’Europe était la solution après deux conflagrations mondiales où des millions de personnes sont mortes et où la souffrance et la fierté nationale ont étouffé les espoirs de beaucoup. A travers le projet européen, le vieux continent est devenu un espace de bien-être, du développement de nouvelles plateformes politiques et économiques.

Cela dépend de nos choix que nous voulons faire avec l’Union européenne, devenir un projet politique important et un espace du futur ou renoncer devant aux faux messages qui remettent en question le rôle et la pertinence de l’UE sans reconnaître, sciemment, les avantages indéniables que ce projet a apporté à ses citoyens.

À la veille des élections européennes, nous devons nous demander « Quelle est l’Europe que je veux ?» et ne pas ignorer le sens et l’importance des valeurs qui ont été la base de ce grand projet humain et politique. Nous vivons vraiment dans un contexte international plein de défis, mais ces défis ne viennent pas de rien: elles sont les conséquences des choix que chacun fait. Par conséquent, mon message aux italiens, roumains et européens en général, est de toujours garder à l’esprit l’importance de nos propres choix et essayer d’imaginer, chaque fois que vous prenez une décision, le monde que nous voulons laisser à nos enfants. Dans le cadre du Centenaire de la Grande Union de la Roumanie, en 2018, je souhaite que la force de l’unité soit reconnue par chacun d’entre nous, comme de même l’importance de fournir un exemple, avec le nôtre comportement, aux générations futures, tout comme les créateurs de l’union roumaine de 1918 nous ont laissé le modèle de participation et confiance, qui peut changer le destin des hommes pour le bien.

 

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