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M. Didier GUILLAUME

Ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation

M. Didier Guillaume ©Pascal Xicluna/agriculture.gouv.fr

Pouvez-vous nous présenter vos missions et vos compétences ? Quels sont les chiffres clés des secteurs d’activité que vous représentez ? Quelle est votre vision de l’industrie alimentaire de demain ? Contraintes et objectifs ?

Je suis heureux d’avoir l’opportunité de m’exprimer sur la question alimentaire. On limite trop souvent l’agriculture à la production en oubliant la principale finalité de sa mission, à savoir l’alimentation. Les Européens aspirent de plus en plus à une alimentation de qualité et les consommateurs que nous sommes, prennent conscience que les enjeux déterminants se situent en amont, sur la manière dont nous produisons. Avec plus de 4 millions d’emplois dans l’agroalimentaire sur le territoire européen, l’Union parvient à nourrir 741 millions de personnes. Au moment où nous devons aller vers la transition écologique, elle peut et doit encore faire mieux. Il est vrai que la France bénéficie d’un environnement favorable qui rend sa production variée et abondante.

Le modèle alimentaire français que je défends, doit tout d’abord faciliter l’accès de chacun à une nourriture suffisante et de qualité. Il est de notre devoir de faire reculer la précarité alimentaire et la famine. Mais la lutte contre l’obésité est aussi une priorité qui se traduit par des actions d’éducation. Eliminer la faim, signifie qu’on améliore aussi la nutrition et la santé et qu’on s’engage sans tarder dans les objectifs de développement durable à l’horizon 2030.

 

A quels enjeux sociétaux et territoriaux devez-vous faire face ? Quelles sont vos actions concrètes pour garantir une alimentation plus saine, plus sûre et plus durable ?

La multiplication des échanges qui influe sur nos habitudes alimentaires, ne doit pas nous faire perdre de vue la nécessité de rapprocher les lieux de production des lieux de consommation. Cela ne se vérifie pas seulement en Europe mais partout sur la planète. Nous devons également mieux informer le consommateur, renforcer les systèmes de transparence et de traçabilité.

Dans la loi issue des Etats Généraux de l’Alimentation, nous avons souhaité que sur les 3,7 milliards de repas servis en France dans la restauration collective chaque année, soit instaurée l’obligation pour les établissements de restauration collective de porter à 50% de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits biologiques. Ainsi le 1er janvier 2022 au plus tard, les repas servis en restauration collective dans tous les établissements chargés d’une mission de service public devront s’y conformer.

Il est aussi indispensable de sensibiliser les jeunes à lutter efficacement contre le gaspillage alimentaire et à les éduquer au goût. Je pense notamment au projet Patrem qui associe le Mucem à un réseau de lycées agricoles en région PACA et dont le but est de confronter des objets du quotidien d’agriculteurs et de pêcheurs à des productions artistiques originales de lycéens inspirées de récits de vie recueillis sur le terrain. C’est un peu le mariage de l’art et de la vie autour de la tradition alimentaire.

La Mission Française du Patrimoine et des Cultures Alimentaire qui a obtenu l’inscription du repas gastronomique des Français sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité à l’UNESCO il y a bientôt dix ans, s’inspire des mêmes fondements. A l’origine, ce patrimoine immatériel se transmet de génération en génération par les communautés ou les groupes en fonction de leur milieu et de leur interaction avec la nature et l’histoire. Pour continuer à faire vivre la pratique sociale de ces traditions, le lien qui associe le goût à la santé est un marqueur tout aussi essentiel que celui indissociable entre le terroir et la diversité de ses productions.

 

Les projets européens auxquels vous participez ? et pourquoi ?

J’ai récemment participé à un colloque international à l’UNESCO « Le goût au service de la santé des consommateurs et du développement durable » dont l’intitulé était suffisamment explicite. Il est annonciateur d’un bouquet de manifestations qui devraient se tenir l’an prochain. 6 ministères français au premier rang desquels celui de la Culture sont associés à la démarche ainsi que le réseau des 5000 restaurants participants à Good France à travers le monde. Dix ans après l’inscription par l’UNESCO du repas gastronomique des français sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel, le président de la République a souhaité que soit organisé à Paris en mars 2020, un forum international dédié à l’avenir de la gastronomie. La réactualisation d’un inventaire des ressources culinaires françaises, initié par Jean FERNIOT au milieu des années 80, sera d’ailleurs en partie confié aux lycées agricoles. Dans cet esprit, la convention Culture-Agriculture renouvelée en 2014, intègre la dimension alimentaire.

Des ambassadeurs comme Philippe Faure ou Alain Ducasse nous aideront à mettre en lumière l’action de la France pour valoriser notre action. Mais ceci n’est pas l’apanage exclusif de la France. Chaque pays est dépositaire de traditions et de goûts culinaires. Partager un repas est une invitation à découvrir la culture de l’autre, et à s’enrichir de nombreux métissages pour réinventer sa propre tradition.

L’autre projet dans lequel nous sommes investis est celui des cités de la gastronomie qui était un des dispositifs clé de la candidature de la France. La force de cette idée tient au fait que les 4 villes sélectionnées (Lyon, Dijon, Tours et Paris-Rungis) travaillent en réseau. Ce qui a le mérite de faciliter les échanges d’expériences et d’ingénierie de projet. Grâce à l’appui de centres universitaires très actifs, et à l’implication des professionnels, chacune a pu développer une activité spécifique qui en souligne l’identité. Tours avec la villa Rabelais a développé un projet axé sur les usages alimentaires et le territoire. Lyon a mis en place un comité scientifique qui travaille sur le lien alimentation et santé. Dijon a créé la chaire « Culture et tradition du vin » et Paris-Rungis compte tirer parti du développement du Grand Paris à l’horizon 2024 lors des Jeux olympiques, pour mettre en avant son projet digital autour des produits du terroir.

 

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