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Mme. Elisabeth AYRAULT

Présidente du Directoire et Présidente Directrice Générale de la Compagnie National du Rhône (CNR)

Elisabeth Ayrault, Présidente Directrice Générale de CNR

Vous dites souvent que CNR accompagne les territoires dans la mise en œuvre de la transition énergétique. Pourriez-vous nous dire de quelle manière cela se traduit ?

Accompagner les territoires c’est, en quelque sorte, l’ADN de CNR. En tant que concessionnaire de l’Etat pour l’aménagement du fleuve Rhône, nous exerçons 3 missions solidaires : produire de l’hydroélectricité, développer la navigation et irriguer les terres agricoles. Ce modèle a, dès l’origine, été pensé pour permettre au bien commun qu’est le fleuve, de contribuer au développement des territoires qu’il traverse. C’est aussi cette identité d’aménageur qui motive notre investissement pour la préservation de la biodiversité, le déploiement de la mobilité douce, du tourisme ou le dynamisme économique en vallée du Rhône. L’ensemble de nos actions sont pensées pour et en collaboration avec les territoires.

Cette co-construction est présente dès notre actionnariat où intérêts et expertises industriels, représentés par le groupe Engie, côtoient intérêt général et connaissance des territoires incarnés par le groupe Caisse des Dépôts et 183 collectivités publiques. Elle se manifeste également au travers de nos développements d’actifs éoliens et photovoltaïques, initiés au début des années 2000 et qui font aujourd’hui de CNR le premier producteur français d’énergie 100% renouvelable.

Dans un contexte de transition écologique, économique et énergétique, cet actionnariat et la proximité permanente avec les territoires sont la base d’un processus d’innovation continue qui nous permet d’anticiper les besoins et de faire évoluer notre modèle industriel en fonction des enjeux nationaux et territoriaux.

Le Port de Lyon – port fluvial, interland du Grand Port Maritime de Marseille que nous avons construit en 1938 et que nous exploitons – est un bel exemple de cette adaptabilité. Espace industriel autrefois en périphérie, le port côtoie aujourd’hui les frontières de la ville qui s’est étendue et oeuvre pour son intégration au milieu urbain.

Ceci passe non seulement par un travail paysager mais aussi et surtout par le développement de services innovants répondant aux besoins d’une ville qui cherche à concilier croissance, développement et transition écologique. En lien avec la Métropole de Lyon et les services de l’Etat, CNR œuvre pour faire du Port de Lyon, le port de toutes les énergies, accompagnateur d’une logistique urbaine douce. Le futur hôtel de logistique urbaine, dont la première pierre a été posée le 9 juillet dernier, en est le parfait exemple.

 

Le quai des énergies, une station de recharge multi-énergies vertes sur le port de Lyon, pour une mobilité durable en cœur de ville

Gouvernance, innovation sont donc 2 des clefs pour la mise en œuvre de la transition énergétique sur lesquels vous vous investissez. Quelles seraient selon vous les autres pistes de solutions ?

Plus aucun scientifique ne le conteste : le réchauffement climatique est une réalité. Ce dont il nous faut maintenant prendre conscience, c’est que ses conséquences sont visibles, non pas seulement en Afrique ou en Antarctique mais également ici, en Europe, en France et sur le Rhône. L’eau devient une ressource rare et inégalement répartie. En 2017, nous avons connu une diminution du volume du Rhône de près de 30% par rapport à 2016. Les experts s’accordent pour dire que les fréquences des phénomènes extrêmes (crues et des étiages) vont s’accentuer dans les années à venir.

La ressource en eau disponible est – avec le prix de vente de l’électricité – l’élément essentiel constitutif du chiffre d’affaires de CNR. Dans ce contexte, nous cherchons donc naturellement à agir rapidement pour lutter et nous adapter à ces nouvelles réalités. Je voudrais insister en particulier sur trois leviers d’action pour la mise en œuvre de la transition écologique :

• Considérer la transition écologique non pas seulement comme une nécessité mais également comme une opportunité, notamment économique. Ce sont de nouveaux métiers et de nouvelles opportunités business qui se créent et qui génèrent un véritable dynamisme. Le soutien aux nouvelles filières est déterminant, c’est pourquoi CNR accompagne notamment celle de l’hydrogène renouvelable dont les débouchés concernent à la fois le secteur de la mobilité et celui de l’industrie. Nous travaillons également à démontrer la rentabilité et l’attractivité des énergies renouvelables, qui sont créatrices d’emplois locaux. Les activités de CNR représentent ainsi 15 000 emplois directs, indirects et induits dont 85% en vallée du Rhône.

• Parler de transition écologique plutôt qu’uniquement de transition énergétique, car la solution est forcément systémique : Elle doit inclure la protection de la biodiversité et la prise en compte du temps long. Un parc photovoltaïque au sol développé sur une surface agricole par exemple n’a pas de sens, de même qu’un fleuve bien géré est un fleuve qui, avant même de produire son premier mégawatt d’électricité renouvelable, a pris soin d’assurer la navigation, d’irriguer les terres agricoles, de refroidir les centrales nucléaires ou de garantir la vie des espèces animales et végétales environnantes. La conciliation des usages est la clef de voûte du modèle CNR, et s’avère particulièrement nécessaire en période de réchauffement climatique, quand l’eau vient à manquer.

• Enfin, sensibilisation et pédagogie sont des instruments indispensables pour la mise en œuvre de la transition écologique. En tant qu’industriel et producteur d’énergie 100% renouvelable, notre rôle en la matière est de démontrer et de faire savoir la pertinence économique de la transition écologique. C’est pourquoi je rappelle aussi souvent que possible la capacité de CNR à remédier au caractère intermittent des énergies renouvelables. Le foisonnement entre nos différentes sources de production d’électricité, couplé à des moyens de stockage appropriés et au pilotage intelligent de la ressource, sont des solutions qui nous permettent d’assurer la rentabilité des énergies renouvelables et la qualité du mix énergétique.

 

Au cœur du modèle CNR, le foisonnement entre plusieurs sources d’énergies renouvelables qui permet de remédier au caractère intermittent de leur production

On comprend la notion systémique qui soutient votre modèle. Mais comment travaillez-vous à la généraliser et à la faire connaître ?

L’ancrage local est important pour CNR, car la transition écologique se fera sur et avec les territoires. Nous sommes un partenaire de référence pour de nombreux acteurs locaux et usagers du Rhône ainsi que pour de nombreuses collectivités dans le développement d’actifs éoliens ou photovoltaïques.

Mais la transition écologique est avant tout une question de volonté politique qui s’exprime aussi à d’autres échelles : nationale, européenne et mondiale. C’est pourquoi nous nous efforçons de faire porter nos messages et de communiquer sur notre modèle. Nos relations avec l’Union européenne se sont intensifiées depuis quelques années et j’ai souhaité il y a deux ans, la création d’une cellule Europe CNR qui facilite notre participation à des projets européens et permet de porter notre message auprès des institutions.

Les équipes de CNR se mobilisent également en Asie, en Afrique et en Amérique du sud grâce à nos missions d’ingénierie. C’est un moyen de mettre notre expérience sur le Rhône au service d’autres gestionnaires de fleuves, pour garantir une prise en compte des enjeux écologiques.

Enfin, nous avons créé l’Initiative pour l’Avenir des Grands Fleuves (IAGF), aujourd’hui association d’intérêt général, qui représente la voix des fleuves à l’international. Elle favorise les échanges et une co-construction des stratégies de résilience face au changement climatique, qui touche l’ensemble des cours d’eau. Un exemple de gouvernance innovante pour la transition énergétique.

 

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