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Mme Karima DELLI

Présidente de la Commission des Transports et du Tourisme du Parlement Européen (TRAN), Députée Européenne

Mme Karima Delli

Pouvez-vous nous présenter les missions et compétences de la commission TRAN ?

La commission des transports et du tourisme, que je préside doit répondre aux préoccupations des citoyens européens. Les attentes sont fortes, nous devons agir pour rendre notre mobilité plus soutenable, plus inclusive, plus sûr et plus connectées. Les transports représentent un quart des émissions de gaz à effet de serre européennes. Ils sont également à l’origine du problème chronique de la pollution de l’air.

Ils doivent désormais être une des grandes priorités du Green Deal européen. Ainsi, la Commission Transports tentera d’encadrer les émissions du secteur maritime et aérien. Il faudra relancer le fret ferroviaire, un plan de rénovation du rail devra être lancé, et renforcer la législation sur le droit des passagers pour la place des vélos dans le trains.

Nous devons nous pencher sur la mobilité durable urbaine et dans les zones rurales, afin de créer des alternatives à la voiture individuelle, avec plus de transports en commun, de pistes cyclables, de fluvial, de marche, ou encore d’autopartage.

Nous devons également anticiper sur le chantier d’une nouvelle politique de transformation dans l’industrie automobile, car il convient d’accompagner des salariés sur le sortie des moteurs thermiques et vers un nouveaux mix énergétique.

Afin de mener à bien ces chantiers, il est notre responsabilité de mettre en oeuvre des investissements justes et d’enclencher la dynamique de nouveaux leviers d’action, comme une redevance poids lourds ou en cure une taxe kérosène.

Enfin, la transition écologique ne peut être efficace dans les transports et acceptée dans le société qui si elle s’accompagne de mesures de justice sociale, avec un regard sur le droit à la mobilité pour tou, selon son porte monnaie et son territoire.

Pour être à la hauteur du XXième siècle, nous devons aussi relever le défi de la digitalisation du secteur.

 

Vous travaillez actuellement sur les transports aériens, quelles seront vos préconisations et vos alternatives proposées ?

Le secteur de l’aviation a jusqu’ici échappé à de nombreuses réglementations mais sa croissance exponentielle fait que son impact grandissant sur le climat ne peut plus être ignoré.

Le secteur de l’aviation est en pleine croissance, puisque en l’an 2000, 1,6 milliards de billets avaient été vendus, contre 4,3 milliards en 2018. Soit une multiplication par plus de 2,5 en moins de 20 ans. L’IATA (association internationale du transport aérien) prévoit à nouveau un doublement du nombre de tickets vendus entre 2017 et 2037, pour atteindre à cette date 8,2 milliards par an.

On estime que l’aviation, par ses émissions de CO2 et autres, est responsable de 5% du réchauffement climatique. Quand on sait que chaque dixième de degré compte, c’est un sujet crucial. Surtout ces émissions ont doublé depuis 1990, et, au vu de la croissance du secteur, si on n’agit pas, elles risquent de doubler encore.

Par kilomètre parcouru, l’avion est le moyen de transport qui a un impact le plus important sur le climat.

Il faut absolument que l’aviation contribue à la lutte contre le dérèglement climatique et cesse donc de bénéficier d’un régime d’exception, qui fait qu’il est aujourd’hui en position de concurrence inéquitable avec des moyens de transports plus propres. Concrètement, cela signifie agir sur plusieurs leviers :

  • Application du principe pollueur-payeur : taxation du kérosène et extension de l’ETS au secteur de l’aviation (notamment suppression des quotas gratuits). Cela peut nous ramener 27 milliards d’euros par an au niveau européen en taxant le kérosène à 33 centimes par litre ;

  • Cesser les subventions aux aéroports ;

  • Appliquer une TVA aux billets d’avion.

Il s’agit tout simplement de faire rentrer l’aviation de la concurrence normale avec les autres moyens de transports, c’est loin d’être révolutionnaire !

Pourtant les alternatives existent et ne demandent qu’à se développer. La première d’entre elles doit être le développement du train de nuit, qui est extrêmement utile pour des distances de 750

  • 1500 kilomètres, qui représentent environ 50% des vols au de la France. Nos voisins européens relancent des lignes, à nous de le faire également !

 

Quelle est votre position sur la reconversion de l’industrie automobile ? où en sommes-nous en Europe ?

L’industrie automobile est extrêmement importante en Europe, avec 12 millions de salariés. Ces emplois sont concentrés sur quelques territoires, le Nord et l’Est en France par exemple. Aujourd’hui, cette industrie doit faire face à des réglementations, absolument nécessaires pour améliorer la qualité de l’air et limiter notre empreinte carbone, qui vont l’obliger à se réinventer.

Pour être honnête, à ce stade, les constructeurs ne font pas face à leurs responsabilités : cela fait des années qu’ils savent que le diesel va devoir disparaître, que l’électrique est une solution d’avenir et au lieu de travailler pour accompagner les salariés et sites concernés, ils produisent des SUVs. J’ai peur d’une casse sociale et territoriale dans les années à venir, du fait de l’impréparation des constructeurs. Je lancerai une initiative pour réfléchir à ce sujet. La transition écologique doit être juste et, dans le secteur de l’automobile en particulier, il en va en premier lieu de la responsabilité des constructeurs de s’en assurer.

 

L’économie circulaire et le recyclage est un des grands enjeux des plans Énergie

  • Climat des pays membres, quelle est votre approche en ce domaine ? et quels en sont les enjeux sociaux et sociétaux ?

Dans le domaine des transports, et notamment de l’automobile, c’est un grand sujet, à plusieurs niveaux. Face à la raréfaction des ressource,s l’industrie automobile n’a d’autres choix que de mettre en oeuvre un nouveau cycle de vie des véhicules, dont les différentes étapes seront celles de l’économie circulaire : recyclage, remanufacturing, réutilisation. Pour réduire la dépendance aux ressources naturelles, la substitution ou la réduction d’usage de matériaux ne suffit pas. Les constructeurs doivent également utiliser des matériaux recyclés.

 

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