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La Banque Européenne d’Investissement reportent à novembre la mise à jour de sa politique de financement énergétique

La Banque européenne d’investissement a décidé mardi 15 octobre de reporter à novembre la décision d’actualiser sa politique de prêt à l’énergie. L’Allemagne et la Commission européenne continuent de faire pression pour que des modifications controversées soient apportées à la proposition initiale qui écartait les énergies fossiles du dispositif.

 

Le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz (à gauche) et le président de la Banque européenne d’investissement (BEI), Werner Hoyer (à droite), au début de la réunion des ministres des finances ECOFIN à Luxembourg, le 14 juin 2019. [Photo: EPA-EFE/JULIEN WARNAND]

Dans la version originale de mise à jour de sa politique de financement, la BEI proposait de supprimer de son vaste portefeuille tous les prêts liés à des projets portant sur les combustibles fossiles d’ici la fin de 2020. Mais ce plan, considéré comme « ambitieux et indispensable » par les groupes verts, a provoqué des résistances.

Le conseil d’administration a décidé aujourd’hui de reporter au 14 novembre une décision finale après ce que l’on a appelé un « débat constructif ». Un porte-parole de la banque a déclaré qu’il ne suffisait que de « clarifier les détails » du projet.

Andrew McDowell, vice-président de la BEI chargé de la politique énergétique, a déclaré dans un communiqué : « Je suis ravi des progrès importants accomplis aujourd’hui et je suis confiant d’obtenir l’approbation finale en novembre. »

Les décisions sont normalement prises par consensus plutôt que par vote et la prorogation est une tentative pour éviter de recourir à un vote, dont le résultat n’était pas du tout clair avant la séance d’aujourd’hui.

Une scission est apparue entre la position de tolérance zéro de la banque en matière de combustibles fossiles, appuyée par des pays comme la France, l’Espagne et le Royaume-Uni, et une révision favorable au gaz, appuyée par l’Allemagne et la Commission européenne. L’Italie est également sceptique quant au plan de la BEI.

Le dernier projet introduit des dérogations pour les usines de gaz naturel les plus efficaces et de nombreuses autres mesures visant à prolonger le soutien au combustible à base de carbone. Mais nous comprenons que la date limite de 2020 est maintenant l’enjeu majeur de cette discorde.

Une échappatoire déjà sur la table serait que les projets qui figurent sur la liste d’intérêts communs de la Commission restent éligibles au financement au-delà de la date de 2020, même s’ils ne sont pas encore officiellement « en cours d’évaluation ». Des sources proches des pourparlers en cours indiquent également qu’une prolongation du seuil de 2020 pourrait être envisagée afin de convaincre les participants de soutenir le plan.

Les experts du climat insistent sur le fait que la BEI tente de préserver l’ethos de sa proposition initiale, mais compte tenu de la structure de la banque, en vertu de laquelle le nombre d’actions détenues par les États membres affecte le poids du vote, des compromis doivent être faits. Cela a laissé les groupes environnementaux indifférents. Sébastien Godinot, du WWF Europe, a déclaré : « Nous sommes consternés par la position rétrospective de l’Allemagne, de la Commission européenne et d’autres. Ils sabotent l’engagement de la BEI à s’aligner sur l’Accord de Paris. »

Avant la réunion d’aujourd’hui, des groupes de la société civile avaient écrit au président de la BEI, Werner Hoyer, pour pousser le prêteur à soumettre son projet initial à un vote. Cela n’a jamais été sérieusement discuté, selon une source bancaire.

Le Royaume-Uni est favorable à la proposition « non-fossile » mais pourrait être retiré de l’équation si le Brexit se déroulait comme prévu le 31 octobre. Un porte-parole de la BEI a déclaré que la question n’avait pas été abordée à la réunion d’aujourd’hui.

 

Participation de la commission

L’eurodéputé vert néerlandais Bas Eickhout a déclaré que  » pour faire de la BEI une banque pour le climat, cette décision devrait être simple : pas de flux financiers vers les fossiles. Retarder cette décision n’a pas de sens.  »

Il a ajouté :  » Nous craignons que le lobby des énergies fossiles se concentre sur l’Allemagne et l’Italie pour les amener à faire pression pour que les subventions sur les énergies fossiles se poursuivent. Dans ce cas, l’économie climatiquement neutre d’Ursula von der Leyen échouerait déjà avant même que la nouvelle Commission ne commence.  »

Le président élu de l’exécutif européen s’est en effet engagé à faire de la BEI la pierre angulaire de ses politiques vertes en réservant la moitié de son financement à l’action pour le climat. Elle a également promis d’augmenter les efforts globaux de réduction des émissions du Bloc européen.

 » La Commission devrait mettre de l’ordre dans ses affaires, puisqu’elle ne peut pas, d’une part, promouvoir publiquement son Green Deal européen en tant que changeur de jeu et, d’autre part, s’opposer aux engagements climatiques de la branche financière de l’UE « , a déclaré Xavier Sol, responsable de l’ONG Counter Balance.

Dans son ensemble, la décision de la BEI est un rouage dans les efforts constants à entraîner l’économie de l’UE dans la trajectoire conforme à l’Accord de Paris. Au cœur de cet effort, il y a un pacte entre les États membres qui assurerait leur volonté collective de devenir neutres en carbone d’ici 2050. La République tchèque, la Hongrie et la Pologne sont les seuls pays de l’UE à ne pas encore l’avoir signé.

La Pologne, en particulier, insiste sur le fait qu’il faut plus d’argent pour se passer du charbon avant de pouvoir se mettre d’accord. La révision de la BEI fournirait une assistance supplémentaire aux pays de l’UE les plus pauvres, mais le retard pourrait maintenant entraver les négociations en cours.

Cependant, une source du Conseil de l’UE a déclaré que l’absence de décision n’était pas une surprise et a cité le fonds ‘’Just Transition’’ et son lien avec le budget à long terme de l’UE comme des facteurs plus importants pouvant faire ou défaire un accord sur le plan 2050.

La politique climatique ne figure pas au programme du sommet d’octobre consacré au Brexit, et les responsables de l’UE se préparent plutôt à des discussions sérieuses lors de leur sommet de fin d’exercice en décembre.

Les membres de l’UE ont déjà convenu en juin dernier, d’achever leurs discussions en la matière d’ici la fin de 2019 afin de signer un accord au début de l’année 2020.

Un accord final est également nécessaire pour que la prochaine Commission propose une loi sur le climat dans les cent premiers jours, bien que les indications actuelles suggèrent que l’administration de Von der Leyen ratera la date de son entrée en fonction le 1er novembre en raison du manque de soutien des députés.

La nouvelle administration pourrait avoir un impact sur le résultat si elle prend effectivement ses fonctions à temps. Bien que la Commission n’ait pas de vote, elle a un siège à la table et a jusqu’à présent joué un rôle crucial dans la promotion des changements.

 

[Edité par Benjamin Fox]
Par Sam Morgan

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