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M. Anthony Cellier

Député à l'Assemblée Nationale Française, Rapporteur du projet de loi "Énergie Climat"

Anthony CELLIER – Droits : DR

Quelle est aujourd’hui la stratégie énergie-climat de la France ?

J’ai l’habitude de dire que le défi climatique est mondial. Une partie de la solution est européenne. L’exemplarité doit être nationale.

Avec la loi Énergie-Climat, entrée en vigueur le 8 novembre dernier et dont j’ai été rapporteur, la France a déclaré l’urgence écologique et climatique. Elle est l’un des premiers pays du monde à le faire.

Je me réjouis que le Parlement européen ait, à son tour, suivi la même voie. La temporalité de ce vote est, d’ailleurs, extrêmement importante. Alors que la nouvelle commission européenne, présidée par Ursula von der Leyen, vient d’être approuvée, le Parlement a envoyé un message fort : la lutte contre le changement climatique doit être une priorité !

Pour en revenir à la France, toujours dans la loi Énergie-Climat, nous nous sommes fixés des objectifs très ambitieux notamment celui d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.

Pour réussir, nous devons agir dans tous les domaines, sur tous les fronts.

Dans le secteur des transports qui représente le plus grand émetteur de gaz à effet de serre en France (29 %), nous agissons notamment via la loi d’orientation des mobilités pour une mobilité du quotidien plus propre avec le développement du covoiturage et des mobilités douces. Dans cette loi, comme dans le dernier projet de loi de finances, nous favorisons l’accompagnement des Françaises et des Français, notamment les plus modestes, vers cette nouvelle mobilité avec une réforme du bonus / malus et une prime à la conversion tournée vers des véhicules plus propres. Les transports, c’est aussi le fret et les marchandises. Nous promouvons et facilitons l’intermodalité comme le ferroutage, par exemple.

Présentation de la loi Energie-Climat à l’Assemblée nationale – Droits : Assemblée nationale, 2019

L’autre grand secteur fortement émetteur de gaz à effet de serre, c’est le bâtiment. Le bâtiment résidentiel / tertiaire représente 25 % des émissions de gaz à effet de serre de la France. Nous avons ainsi fait de la rénovation énergétique une de nos priorités. Parce que rénover son logement, c’est bon pour la planète, c’est bon pour le confort et la facture de nos concitoyens, mais également c’est bon pour notre système énergétique. Tant dans la loi Énergie-Climat, qui crée un triptyque de l’action pour la rénovation des passoires énergétiques – information, obligation de rénovation et sanction –, que dans le projet de loi de finances pour 2020, en passant par des actions qui ne relèvent ni de la loi ni du règlement, nous apportons plus de simplicité et de lisibilité et donnons les moyens à chacun de rénover. Le chemin est encore long mais nous sommes pleinement mobilisés sur le sujet !

Avec la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous dite EGAlim, nous favorisons l’agroécologie. Avec la loi lutte contre le gaspillage et économie circulaire, nous voulons mettre en place une nouvelle façon de consommer. Parce que consommer, cela a un impact sur le climat et sur l’environnement. Parce que consommer mieux au quotidien, c’est déjà agir !

L’action, elle se fait dans la consommation mais également dans la production : industrie, agriculture, énergie…

Nous avons d’ailleurs choisi de ne plus explorer et extraire des hydrocarbures fossiles sur le territoire Français et de fermer nos quatre dernières centrales à charbon. Quand cette annonce de fermeture a été faite, certains ont pu dire que c’était anecdotique, que les centrales ne représentaient qu’1,8 % de la production d’électricité en France. 1,8 % certes, mais 35 % des émissions de CO2 du secteur.

Autre avancée de cette loi, désormais le Parlement français sera pleinement impliqué dans la définition du cap et des grandes orientations climatiques et énergétiques de la France, à travers une loi quinquennale qui précédera l’adoption des futures programmations pluriannuelles de l’énergie et stratégies nationales bas carbone.

La stratégie énergétique et climatique de notre pays ne peut se réaliser qu’avec l’appui et en prenant en compte les spécificités de nos territoires : que ce soit en matière de production d’énergie avec des territoires ensoleillés, marins, venteux, agricoles ou ayant une culture nucléaire, que ce soit en termes de rénovation énergétique et de mobilité… La transition énergétique ne se fera qu’avec les territoires !

 

Inauguration du parc photovoltaïque EDF d’Aramon sur le site de l’ancienne centrale fioul – Droits : DR

 

Vous avez donc été rapporteur de la loi ‘’Énergie Climat’’, pouvez-vous nous résumer ce projet de loi ? Sa philosophie ?

Il est toujours difficile de résumer une loi, surtout quand on l’a portée et qu’on l’a faite grandir – d’un texte de 8 articles, nous avons débouché sur 69 articles.

Mais, si je devais en extraire une philosophie, ce serait celle de toucher le quotidien des Françaises et des Français. En tant que rapporteur, j’ai toujours été préoccupé par la volonté de faire de cette loi, très technique à la base, une loi qui parle aux citoyens.

La loi Énergie-Climat, c’est la neutralité carbone à l’horizon 2050 et la fermeture des quatre dernières centrales à charbon. Cette fermeture, elle impacte des centaines de femmes et d’hommes qui perdent leur outil de travail et qu’il faut accompagner. C’est ce que nous avons encadré dans la loi !

Nous fixons aussi un objectif de baisse en 2030 de la consommation d’énergies fossiles de – 40 % via, par exemple, la réduction des voitures thermiques et la disparition des chaudières au fioul. Nous soutenons davantage le développement des énergies renouvelables notamment l’hydroélectricité, l’éolien en mer, l’hydrogène et le photovoltaïque avec des objectifs plus ambitieux et des mesures de simplification et de transparence.

La loi encourage également les citoyens à produire leur propre électricité au sein de communautés d’énergie tout en préservant notre modèle de solidarité avec un accès au réseau électrique pour tous au même prix.

Je vous le disais, nous agissons sur la rénovation énergétique avec le renforcement du contrôle des certificats d’économies d’énergie (CEE) et de la lutte contre la fraude pour préserver nos concitoyens des mauvaises expériences.

Nous actons la prise en compte de l’empreinte carbone des produits d’importation et des objectifs de réduction de celle-ci. Nous créons le Haut Conseil au Climat, organe indépendant d’experts climatiques.

Enfin, je pense que les entreprises ont une forte responsabilité à jouer dans la transition écologique. Je parlerais même d’accélération écologique… Nous instituons donc un « reporting vert » plus poussé comprenant un bilan des émissions de gaz à effet de serre des entreprises avec un plan de transition pour réduire ces émissions. Nous mettons également en place une obligation pour certaines sociétés d’investissements de présenter les impacts de leurs opérations sur le climat et la biodiversité.

Outre la loi et les obligations qui en découlent, je pense qu’un chef d’entreprise ou un capitaine d’industrie, c’est une femme ou un homme qui ose, qui sait prendre des risques mais qui a aussi de l’intuition. L’intuition que l’urgence écologique et climatique est réelle, que ce n’est pas qu’une ligne dans la loi Énergie-Climat, pas qu’un caprice de notre jeunesse, pas qu’un sujet d’experts ou de scientifiques. L’intuition d’anticiper l’impact que va avoir ce sujet sur notre société, notre économie et donc sur l’entreprise.

Certains l’ont déjà compris, d’autres s’inscrivent dans une transition et quelques-uns continuent sur leur trajectoire. Cette dernière option n’est plus possible. Il ne suffit pas de parler de transition écologique dans des séminaires, il faut agir !

 

Présentation du Contrat de Transition écologique Aramon-Gard Rhodanien et de la Cleantech Vallée au Salon des Maires – Droits : DR

 

Comment la France peut-elle être un vecteur pour l’Europe à la veille des grands débats sur le Green Deal Européen ?

Nous l’avons vu, la France a fait des émules au Parlement européen qui a également choisi de déclarer l’urgence climatique et environnementale.

Si l’on regarde le Green Deal annoncé par la Présidente von der Leyen dans son programme, il s’agit de mesures ambitieuses dont certaines ont déjà été prises par la France, telles que la neutralité carbone à l’horizon 2050 ou la décarbonation des secteurs les plus émissifs de gaz à effet de serre, ou ont été proposées par elle comme ce fut le cas pour la Banque du Climat.

Au niveau européen comme international, le président de la République, Emmanuel Macron, a toujours su porter une voix réaliste et ambitieuse sur la lutte contre le changement climatique, auprès du Conseil européen, au One Planet Summit ou encore, en septembre dernier, au sommet des Nations Unies sur le climat.

Cependant, je le disais, le défi climatique est mondial.

La France peut être exemplaire, et même en faire plus. Les exemples sont moteurs. Ne pas financer à l’étranger ce que la France s’interdit sur son propre sol, c’est la ligne que j’ai choisi de porter et de défendre au sein du projet de loi de finances pour 2020. Ainsi, nous limitons voire interdisons les garanties publiques à l’export pour les énergies fossiles.

C’est cependant une volonté commune de tous les États, et notamment des plus émetteurs de gaz à effet de serre, qui permettra d’éviter l’irréparable. Pour reprendre les mots du Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Gutteres, ne trahissons pas « la famille humaine dans son ensemble et toutes les générations à venir ».

 

Assemblée Nationale – 126, rue de l’Université – 75355 Paris 07 SP – Tél : 01.40.63.74.3
Circonscription – BP 63139 – 30205 Bagnols-sur-Cèze – Tél : 04.66.89.72.16

 

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